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Guitar Sunrise

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11 novembre 2012

Résumé du voyage

Bonjour à tous.

Si vous avez suivi toutes mes histoires, cet article est peut être le truc le plus intéressant à lire depuis plus d’un an que je passe à raconter ma vie ! Si par contre vous n’avez rien suivi et que vous découvrez ce blog, cet article est peut être la seule chose que vous avez besoin de lire! Enfin, à peu près...! Voici donc en totale exclusivité: le résumé du voyage ! Lassé de lire des bouquins de voyage ou des blogs (incluant le mien) qui se contentent de d’empiler les anecdotes du genre « j’ai fait ci, j’ai mangé ça, j’suis allé là, c’était trop génial, whoo etc… », voici enfin un article qui s’attarde un peu sur le fond des choses et toute la partie introspective de ce voyage. Le but étant d’expliquer ce que j’ai réellement appris durant ce voyage et comment il m'a changé. Alors allons-y !

20 juillet 2011, je quitte fièrement mes Alpes natales, surexcité de partir enfin pour le voyage de mes rêves. Après 3 ans et demi de thèse dans la grisaille d'une banlieue Parisienne et deux mois de préparation pour le voyage j’ai besoin d’intensité. Je pars donc à fond la caisse. En ce début de trajet je suis pressé comme un citron par les dates de mes visas Turkmène et Ouzbèk qui conditionnent le temps que je dois passer en Iran, en Turquie et donc dans les Balkans avant tout ça… Un show millimétré. Aujourd’hui je me demande pourquoi j’ai choisi un timing aussi serré. La première raison est que j’ai envie de foncer à ce moment-là, la deuxième est qu’en fait n’ayant aucune idée de ce qui m’attend en ces terres inconnues je me calque sur mes ainés, ceux qui ont déjà fait ce genre de voyage, je pense à mon pote Benj et à mes copains du blog « le ciel pour toît ». Mais aujourd’hui je crois que la raison principale est qu’à l’époque j’avais encore au fond l’illusion qu’en visitant beaucoup de pays différents, je verrais plus de choses…

Ma traversée des Balkans est exactement ce dont j’avais besoin : pleins d’amis, pleins de rencontres, fête à gogo, soleil, moments intenses qui s’enchainent à grande vitesse, nikel ! Me voici donc en Turquie. Après une semaine d’immersion dans l’ambiance d’Istanbul, je me lance dans une course aux sites touristiques majeurs du pays selon un parcours que j’ai tracé durant des heures en lisant des guides de voyage avant de partir. A cette époque évidemment le guide du lonely planet est mon meilleur ami, inutile de le préciser… Et puis en plein milieu de cette course folle, arrive ce jour que je ne suis pas prêt d’oublier. Je suis dans la magnifique ville de Kas remplie de jolies ruines au bord d’une mer turquoise et j’ai prévu de grimper au sommet d’une montagne pour photographier le coucher de soleil. Un plan sans accros, sauf que mon appareil photo meurt ce jour-là. Je me dis donc tout naturellement « Bon ben tant pis, plus besoin de grimper la montagne du coup »… Immédiatement après avoir eu cette pensée je remets le monde entier en question. Qu'est ce que j'ai vraiment envie de faire en fait? Ai-je envie de voir ce coucher de soleil ou juste de le photographier ? Qu’est-ce que je fais là ? Suis-je ici uniquement pour pouvoir dire et montrer aux gens que j’y suis allé ? Qu’est ce que je veux en réalité? Et alors là, une porte s’est ouverte en moi laissant entrer toutes les questions existentielles possibles et imaginables. Les questions principales que je me posais à cette époque convergeaient toutes globalement vers celles-ci: Pourquoi je voyage ? Et qu’est-ce qu’un bon voyage ?... En fait ces questions m'ont suivies tout le temps. C’est à partir de là que j’ai commencé à observer les autres voyageurs et à me demander s’ils suivaient la voie que je voulais suivre aussi.

Coluche a dit un jour : « Pour avoir une bonne idée c’est pas compliqué : il suffit d’en avoir une mauvaise et puis de faire le contraire ». Cette petite phrase drôle sans prétention est en réalité surpuissante : C’est la base du résonnement par l’absurde. J’ai passé tout mon voyage à appliquer cette idée simple et géniale : J’analyse les comportements que je trouve idiots et je m’efforce de faire l’inverse. C’est là que j’ai découvert la triste réalité des choses : Il est complètement possible de voyager pendant des années et de rester tout aussi stupide et étroit d’esprit qu’avant de partir… Pire : j’ai même découvert qu’il est possible de devenir encore plus idiot qu’avant d’être parti. C'est triste à en pleurer! Par exemple, je connais personnellement des gens qui continuent d’être islamophobes après avoir passé des mois entiers dans des pays musulmans… Comment est-ce possible ? Très vite je cible un premier type de voyage que je ne veux pas faire : le voyage de type agence touristique. On vous met dans un bus, on vous arrête à une multitude de sites communément appelés « immanquables », vous prenez quelques photos avec vous dessus et vous repartez dire à vos copains à quel point vous connaissez bien le pays… Résultat : les seuls locaux que vous avez rencontrés sont: le personnel des hôtels et restaurants, le guide et les vendeurs de souvenirs. A mon sens, autant rester chez soi à lire Geo ça coûte moins cher… Or, je me rends compte avec effroi que je suis en train de faire exactement ce type de voyage, mais tout seul. C’est encore plus idiot, avouons-le !

Bref, je continue mon périple et arrive à Erzurum, tournant du voyage. J’y reste bloqué 1 semaine, furax du retard de mon visa Iranien. Aujourd’hui je suis convaincu que c’est la meilleure chose qui pouvait m’arriver. J’ai passé une semaine nourrit et logé dans une résidence universitaire entouré de Turcs Musulmans pratiquants et parlant peu Anglais. Les gens les plus généreux que j’ai jamais rencontré. Un bon coup de bol pour ma première vraie expérience d’immersion dans une autre culture. Si aujourd’hui je n’ai que de vagues souvenirs de ma visite d’Ephèse, qui est pourtant LE site touristique immanquable de Turquie par excellence, je me souviens en revanche clairement de tout mon séjour à Erzurum qui m’a plus que marqué. Je m’y suis fait de vrais amis avec qui je suis encore en contact aujourd’hui, j’ai découvert une autre façon de vivre et de fonctionner emplie de bonté. En passant, Erzurum me force aussi à prendre du repos; chose que je n’avais pas vraiment faite jusque-là mais qui est essentielle lors d’un long voyage.

Mon séjour en Iran est ultra rapide mais très formateur car riche en rencontres improbables. J’ai droit au fameux accueil Persan et je dois dire que les Turcs ont placé la barre tellement haut qu’il m’est difficile de confirmer l’auto-proclamation des Iraniens comme étant les plus accueillants du monde... Disons qu’ils sont ex-æquo sur le podium, mais alors il faudrait aussi y mettre les Ouzbek, les Kirghizes, les Laotiens, les Cambodgiens, les Papous... En fait il faudrait y mettre un peu tout le monde. Donc non, il n’y a pas vraiment de podium.

Bref, je rencontre Angelika, la première personne qui m’explique les bienfaits d’un voyage sans appareil photo. Je la comprends assez bien grâce à mon expérience de Kas et l’idée prend peu à peu racine dans ma petite tête. J’apprends à gérer mon stress dans des situations où j’ai l’impression de n’avoir aucun contrôle… J’apprends même à apprécier ce genre de moment. C’est tout mon côté « Français » ou plutôt « occidental » qui s’émousse.

Ces péripéties m’amène jusqu’à Dubai où j’y retrouve ma copine. C’est le premier changement de programme sur mon planning serré: je fais une croix sur le Turkménistan et le remplace par les Emirats. Ce détour est formateur car il me sort du « formatage » de mon trajet. Je me suis forcé jusque-là à suivre une direction tout en respectant un timing. Je réalise peu à peu qu’en fait je suis libre d’aller absolument où je veux. C’est d’ailleurs pour ça que je suis parti : pour me donner à chaque instant l’opportunité de choisir entre aller à droite ou aller à gauche… Le fait d’arriver à Dubai libère un sentiment magique en moi, j’ai l’impression d’avoir accompli quelque chose de grand : je suis venu jusqu’ici par les routes et les mers. Après la Turquie et l’Iran le fait d’être de retour dans un pays « Occidentalisé » me donne l’impression d’être rentré à la maison.

Durant mes 15 jours en Ouzbékistan je rencontre un nombre incalculable de baroudeurs de haute voltige. Ça change des backpackers Européens… Le plus passionnant et inspirant d’entre eux est Doudou. Il passe les 3 quarts de son temps sur les routes, à voyager uniquement en stop. Il m’explique la richesse de ce qui se trouve caché derrière les beaux sites touristiques et l’importance de prendre du temps pour les voir. Il m’encourage vivement à ralentir mon rythme. J’ai du mal à m’identifier à tous les autres qui collectionnent les visas dans leur passeport comme des timbres dans un album… Cela dit, à ce moment la durée de mes visas est toujours aussi contraignante, je n’ai droit qu’à 15 jours dans ce pays et j’ai envie de voir les principaux sites attractifs de l’Ouzbékistan. J'ai tout de même acquis en peu de patience et de sagesse entre temps et me laisse un peu plus aller au freestyle... C’est ainsi que je décide de passer plus de temps dans la magnifique ville de Khiva au lieu d'aller voir la mer Aral mourante. Je réussi à vaincre cette voix au fond de moi qui me dit "si tu ne vois pas ca maintenant, tu ne le verras jamais!" car je realise qu'il en va de même concernant les habitant de Khiva. Je commence à aller de moi-même vers les locaux, à essayer de les connaître, de les comprendre, à m’intéresser plus à eux qu’à l’architecture. D'ailleurs au fait est-ce que j’aime vraiment l’architecture ?...

Le Kirghizistan est clairement un autre gros tournant du voyage. A partir de là, fini les échéances de visa trop courtes et les plans à courir dans tous les sens… Plus ou moins. J’y rencontre beaucoup de voyageurs passionnants qui m’inspirent. Clément et Gabri deviennent mes premiers compagnons de voyage. On est tous partis environ au même moment, on a tous traversé l’Ouzbékistan et on découvre ensemble de nouvelles façons de voyager. Mathieu (du blog « un globetrotter polyglotte ») est celui qui nous initie à l’auto-stop. Autant dire qu’il change nos vies. Il me donne l’impression d’être beaucoup plus libre que moi : il est la liberté incarnée. Il va absolument où il veut quand il veut comme il veut sans suivre un trajet précis et sans guide de voyage. Je change complètement ma façon de voyager au Kirghizistan. J’apprends à me connaître de mieux en mieux, à savoir ce que je veux, ce que j’aime, ce qui m’aide dans ma quête de liberté… Tiens, « Quête de liberté » ? Commencerais-je à mettre des mots sur ce qu’est l’essence du voyage ? Commencerais-je à savoir ce que je cherche ?

En Chine j’applique mes nouveaux enseignements et vais vers les choses que j’aime. Je passe une semaine à Kashgar avec le génial Mohamed Emin, le luthier Ouïghour multi-instrumentiste. Je fais une traversée du pays avec un compagnon Chinois que je ne comprends pas, je passe mon temps à refaire le monde avec mon hôte à Beijing… Je transforme mes visites touristiques en expériences de vie à la grande muraille et au temple du paradis, je prends mon temps. Je passe mon séjour à Shanghai avec des amis ou des nouvelles rencontres et ne vois rien de la ville.

Comme si ce n'était pas suffisant, la Chine m’explose le cerveau en mille morceaux en termes de choc de culture. Je passe mon temps à me demander comment il est possible que des humains vivent de la sorte! Comment? Tout est tellement différent de chez nous… J'ai du mal à m'entendre avec les Chinois au premier abord je l'avoue... Il me faut du temps pour réaliser qu’ils ne sont ni impolis, ni stupides, ni méchants, ils sont justes Chinois… Comprenez : ils ont juste des mœurs différentes des miennes qui d’un point de vue bêtement occidental peuvent paraître parfois impolis, stupides ou méchants… Au début le « Chinese way of life » me parait tellement aberrant que je ne peux pas discuter plus de 10 minutes avec un Chinois sans lui demander pourquoi il ne fait pas la révolution... Puis leur formatage me ramène au mien et me force à une grosse prise de recul. Mon « Western way of life » a-t-il plus de sens ? Est-il moins ridicule ? Non, ex-æquo encore une fois… Je mets le doigts sur beaucoup d’idées préconçues qui ont été forcées dans mon petit cerveau depuis ma tendre enfance…

A Hong Kong, il se passe un évènement similaire à celui de Kas. Je me retrouve un jour dans la queue pour un télésiège sensé m’amener vers la plus grande statue de Bouddha du monde. Alors que je m’apprête à entamer ma 2ième demi-heure d’attente je me rends compte de l’absurdité de ce que je fais. Je m’apprête à faire une longue attente et à payer cher pour grimper voir une statue dont je vais juste prendre une photo ou deux avant de redescendre et dont je me contre-fiche… Je m’enfuis donc de cette queue à grande jambe au grand bonheur des gens derrière moi qui gagnent 1 minute d’attente. Armé de ma guitare je m’enfonce dans la jungle de cette île sublime. J’y découvre des endroits à la fois gratuits et improbables et joue beaucoup de musique. C’est la première fois que je me rends compte de l’immense différence de valeur entre une vulgaire visite et une vraie expérience de vie. Tout est là en fait ! Rebelote plus tard à Macao, je préfère jouer de la musique sur la plage à passer du temps dans les casinos bruyants et chiants à mourir…

Je retrouve ensuite ma copine en Malaisie où on passe de superbes vacances. Les discussions que l’on a ensemble m’aident à mettre des mots sur mes apprentissages et à prendre un peu plus de recul sur ce que je cherche dans mon voyage.

Arrivé à Bangkok, je retrouve mes deux amis de toujours Bryan et l’obèse. On passe deux semaines tous les trois, plutôt dans une optique de vacances et de profiter d’être ensembles… Oui car j’ai oublié de le préciser mais je ne me considère pas en vacances la plupart du temps, mais j’y reviendrai… En tout cas, c’est aussi ça voyager : partager de bons moments entre amis et passer de bonnes vacances.

Lors de ma traversée du Laos et du Cambodge en stop avec l’obèse, on reprend en quelques sortes mon voyage là où je l’avais laissé en Chine. On se met volontairement dans les situations les plus improbables possibles et on en sort grandis par des expériences géniales. Au sud de Laos on rencontre Nounou, un Portugais comédien-psychologue qui m’aide à mettre un nouveau mot sur ce que je cherche dans mon voyage : "Identité". Ca me trottait en tête depuis un bout de temps, j’avais cette idée que les musiciens de génie que j’admire, sont plus eux-mêmes que je ne suis moi-même. Constat effroyable qui me fait beaucoup cogiter depuis un moment sur l’importance de l’art dans la vie d’un humain.

A Vientiane, ma rencontre avec Mr Ghong le joueur de Gajubpi est géniale mais trop courte. Je réalise alors quelque chose de nouveau : l’absurdité des collections. C’est l’une des choses contre lesquelles je me bats. Collectionner pour collectionner et rien d’autre, ça n’a aucun sens. Que ce soit des timbres, des visas, des annecdotes, des connaissances, des photos… Ou des interviews de guitaristes par exemple. Hahaa nous y voila! Oui car ce n’est pas ça que je veux au final: Avoir une interview de guitariste dans chaque pays juste pour dire que j'en ai une. Non, ça n’a aucun intérêt si ça se limite à ça… La spirale existentielle s’intensifie. Sur une réflection de l'obèse je me mets à voir les choses différemment: d'aprés lui la manie de collectionner (qui peut être maladive) est à la base du capitalisme. Je trouve ça complètement vrai. Alors le tourisme de base qui n'a pour but que de collectionner des photos, des annecdotes, des biens matériels, des visas, serait-il une forme de capitalisme? Oui j'en suis convaincu.

Plus tard les Cambodgiens me font réfléchir au bonheur : la capacité à se contenter de ce que l’on a. On rencontre des gens qui ne possèdent rien mais passent leur temps à rire, tandis que nous avons tout et passons notre temps à nous plaindre. Il y a clairement un gros souci dans l’équation… Et beaucoup de boulot à faire là-dessus pour atteindre leur niveau.

Et puis je fais un aller-retour en France… Faute  de parcours impardonnable pour tout globe-trotter qui se respecte, du moins c’est ce qu’on me dit. Je mets du temps à prendre cette décision, j’ai du mal à l’assumer au départ. Pourtant aujourd’hui je considère ça comme l’une des expériences les plus formatrices de ce voyage. Déjà parce que j’y ai fait un super séjour mais aussi parce que j’y ai réalisé beaucoup de choses importantes. Comme je l’ai dit plus haut, je suis parti pour me donner à chaque instant l’opportunité de choisir entre aller à droite ou aller à gauche… Belle étroitesse d’esprit de jeunesse ! En réalité,  ce ne sont pas les seules options. Je peux aussi par exemple m’arrêter, faire demi-tour, grimper aux arbres… Où même sauter à cloche pied en spirale en faisant la danse des canards si je veux…  TOUT est possible ! C’est ça être libre. Une fois qu’on s'en rend compte, il reste juste à savoir le plus difficile : Qu’est ce qu’on veut vraiment ?? Il faut du temps déjà pour se rendre compte qu'on est libre et encore plus pour savoir quoi faire de sa liberté. J’ai l’impression d’avoir été un de ces esclaves noirs Américains que l’on voit dans les films. Quand on les libère à la fin de leur vie ils continuent à servir leur maître car ils ne savent pas quoi faire d’autre. En fait non, ils ne savent pas se demander ce qu’ils veulent ! Bref, je ne considère donc pas ce retour en France comme un break dans mon voyage, ça fait complètement partie de l’aventure à mes yeux. Nouvelle question alors : Faut-il forcément se déplacer géographiquement pour voyager ? Non j’en suis aujourd’hui persuadé.

Et puis me voici de retour sur les routes de Bornéo, tout seul cette fois. Nouvelle problématique existentielle à résoudre : Qui suis-je ? Celle-ci est corsée. J'ai un énorme besoin de solitude pour trouver des éléments de réponse... Je pourrais très simplement me définir comme étant un mec qui a fait de longues études, qui joue de la guitare et qui a fait un long voyage. Oui sauf que c’est faux : si jamais je me casse les deux mains je ne peux plus jouer de guitare, si  je n'ai pas de boulôt mes études ne me servent à rien et quant à mon voyage il n’est intéressant que lorsque je veux bien en parler… Pourtant je reste moi. Je ne suis pas qu'une somme de compétences, je ne suis pas un CV... Alors qui suis-je sans tout ça ?  C’est la réponse à cette question qui me fait voyager. C’est elle qui fait que je m’inspire ou pas des gens que je rencontre et qui me fait tendre vers un idéal que je n’arrive pas à définir. Qu’est ce qui fait la vraie valeur d’un humain à mes yeux ? Ce qui est certain c’est que ce n’est ni ses compétences, ni ses accomplissements et encore moins ce qu’il possède. Car c'est désormais clair après toutes ces rencontres et au cas où ça restait encore à prouver: On peut avoir fait 6 tours du monde, avoir 3 doctorats, parler 20 langues et être quand même un idiot complet.

Alors voyons voir... Aux yeux de certains je suis quelqu'un de réservé, pour d’autres je suis marrant et extraverti, pour d’autres je suis fou, aux yeux de ma mère je suis un saint, aux yeux de mes patrons de boulot je suis sérieux… En fait je joue volontiers le rôle qu’on veut bien me donner. Mais si j’enlève tous ces masques, qu’y a-t-il derrière ? Pour y répondre j’ai besoin de deux éléments : ma guitare et une plage déserte, d’où mon retour en Malaisie. Quand je campe sur une plage déserte, je peux appliquer le principe de liberté absolue. Je peux crier si je veux, je peux me mettre entièrement nu si je veux, je peux faire tout ce que le regard des autres m’empêche de faire en temps normal. La question existentielle numéro 1 revient alors plus fort que jamais : Qu’est ce que je veux bordel? C’est elle qui mène à la question du « qui suis-je ? ».

J’ai donc joué beaucoup de guitare en Malaisie en m’imposant une rigueur quotidienne assez stricte (bonjour la liberté). J’ai surtout essayé de séparer le travail technique des moments de création et d’improvisation. Ces deux derniers termes ont eux aussi créés beaucoup de débats internes puisqu’on ne peut créer que des choses que l’on a déjà entendues. Par contre ce que je peux faire c'est assembler ces choses d'une façon originale car je suis le seul à avoir vécu la vie que j’ai vécue… C'est comme ça que j'obtiens mes premiers éléments de réponse. Le vrai travail est d’aller chercher des notes qui sont en moi et de les sortir sans qu’elles soient filtrées par tous mes "masques". Vraiment pas facile, surtout quand ça n’avance pas, j’ai vite tendance à remettre en question tout l'univers cosmique… Par contre, c’est extrêmement enrichissant dans les moments ou ça avance. 

A force de passer plusieurs heures assis au même endroit sur des plages avec ma guitare, j’observe de plus en plus la vie sauvage qui m’entoure. Peu à peu, les Bernard l’Hermite s’habituent à moi et me grimpent dessus, les lézards se promènent juste à côté sans se cacher, les crabes font des boulettes de sable entre mes jambes, les moustiques essaient de me bouffer en permanence, les singes mangent des feuilles juste au dessus de ma têtes et me les font tomber dessus, les hirondelles virevoltent par ci par là… Chaque entité vivante qui m’entoure fait exactement ce qu’elle a à faire et sait exactement ce qu’elle veut. Le fait qu’elles commencent à interagir avec moi me fait réaliser ce fait simplissime : je fais moi aussi partie de ce monde. Je ne suis moi aussi qu'une bête parmis toutes celles-ci, rien de plus. J’ai passé beaucoup de temps à l’ignorer. Elles finissent par me traiter comme l’une d’elles, comme s’il était normal que je sois là. Mais est-ce normal ? Suis-je sensé être sur une plage avec une guitare ? Autant qu’un crabe qui fait des boulettes ?... Oui absolument ! Je fais juste partie d’une espèce qui a besoin de ça pour exister. Nous autres humains ne pouvons pas nous contenter de naître, procréer et mourir comme semblent le faire les crabes. Il nous en faut plus ! On a besoin de trouver un sens à nos vies, ou plutôt de s’en créer un, voire même de créer des choses tout court. Aussi anodin que ça puisse paraître, cette révélation me donne la banane pendant des semaines…

En occident on oublie tout ça. Une bonne nature est une nature contrôlée. L’herbe non-coupée : c’est moche, les arbres non-taillés : c’est bordélique, les insectes : c’est la fin du monde (sales, dégoutants, beurk!). En fait chez nous, un monde parfait est un monde sans nature, ou alors juste un peu pour faire joli. On en oublie comment fonctionne le monde. A tel point que c’est même devenu un luxe: on achète du bio les yeux de la tête, on va au zoo, on achète du cosmétique à base de produits naturels (parce que « c’est mieux »), on se bat pour vivre à côté d’un parc parce que c’est joli, tant que les insectes n’entrent pas chez nous. Et puis à l'occasion on râle parce que la grande barrière de corail est détruite. En Malaisie, beaucoup de gens vivent avec les insectes en permanence. Fourmis, cafards, araignées, milles pattes, coléoptères et hannetons immenses. Ils sont partout dans les maisons et tout le monde vit très bien avec. Lorsque j’étais à Kuala Lumpur je me lançais parfois dans des chasses aux gros cafards chez mon hôte en pensant lui faire plaisir, jusqu’à ce qu’il me demande de les laisser tranquille : ils ne m’ont rien fait. C’est vrai ! Tuer un insecte juste parce qu’on le trouve moche, c’est l’équivalent du pire des racismes… Aujourd’hui je ne tue plus d'insecte, mis à part les moustiques quand même: mauvais réflexes!
Bref, ma route me mène ensuite à Kota Kinabalu, au nord de Bornéo j’ai une petite baisse de moral. Parfois trop de solitude tue la solitude. J’ai besoin de faire des rencontres, de nouvelles inspirations pour continuer d’avancer. J’ai besoin d’intensité, de faire la fête pour retrouver le pêche. J’obtiens tout ça sans soucis… Nikel, c'est reparti!

Ceci m’amène en Indonésie, un pays qui me force à vivre à sa façon. En Malaisie, il est possible de grimper dans un bus et faire 300km en 4 heures, avec son walkman peinard. Pas en Indonésie : parcourir 300km peut prendre deux jours. Il faut faire de multiples haltes, intéragir avec les locaux, manger, discuter, dormir avec eux, ou plutôt passer des nuits blanches dans des bus ou des taxis avec la musique à fond la caisse. Dans ce genre de cas, on apprend vite à communiquer. L’Indonésie m’a appris à toucher le fond, à oublier toute sorte de confort tout en profitant de la vie. On en revient encore à ce point important concernant l’essence du voyage : l’expérience de vie. Faire 300km en 4 heures ce n’est pas voyager, c’est juste se déplacer. En gros, si on ne vit rien, on ne voyage pas.

Si l’Indonésie est un gros choc de culture, il reste petit par rapport à celui de la Papouasie Occidentale et de la PNG. Ces endroits poussent à réfléchir sur l’humain de manière général… J'y rencontre des gens dont la seule "contrainte" journalière est de faire en sorte qu'ils puissent se nourrir (en cultivant leur terre). Le reste du temps, ils le passent à faire ce qu'ils aiment ou à réfléchir à ce qu'ils aimeraient faire... Un style de vie très similaire au mien en fait! Chez-nous on passe notre temps à travailler mais on oublie pourquoi. On n'a pas le temps de se demander ce que l'on aimerait faire et on n'a pas vraiment besoin de se le demander. Car une fois que l'on a suffisament travaillé pour se nourrir, se loger, s'éduquer et se soigner, on continue à travailler. Ensuite il n'y a qu'à tourner la tete pour qu'une pub nous dise quoi faire de notre "excédent de travail"...

Et puis tout ceci m'amène en Australie, un choc culturel inversé: le retour parmi les miens, les occidentaux. Tout n’est que consommation et détournement de regard vers des choses futiles. J’ai du mal à me sentir connecté avec les gens que je rencontre en auberge de jeunesse, si bien que je me retrouve à trainer avec des hippies, ceux avec qui je m’entends le mieux. Vivre pieds nus et sans argent… Est-ce là ma voie dans ce genre de pays? Il y a peut être quelque chose à creuser en tout cas. Néanmoins une fois ce choc inverse encaissé, ce pays est tout de même rempli de bons cotés. L'un d'eux est l'immense diversité de personnes que l'on peut y rencontrer, notament des gens qui me ressemblent et qui se posent les mêmes questions que les miennes. Cool je ne suis pas le seul alors, je ne suis pas fou!

Alors où en suis-je aujourd'hui sur les questions existentielles de base? Premiere question: qui suis-je au final ? Aujourd’hui je me vois comme un point qui avance dans un immense espace à plusieurs dimensions : il y a entre autres la dimension géographique dans laquelle je bouge, mais aussi la dimension émotionnelle, la dimension de la maturité, la dimension de la musique… Il y a peut-être une infinité de dimensions dans cette espace, et moi je suis une sorte de chemin parmi tant d’autres qui s’agrandit de jours en jours. Ce qui me définit c’est mon point de départ et mon chemin parcouru. C’est ce qui conditionne ma façon d’assembler mes idées.

Ce dont je me suis rendu compte c'est que dans cet espace, l'itinéraire de chacun est poussé à graviter autour d'une autoroute construite par le système dans lequel on vit. Il nous dicte à tous comment nous comporter, comment nous habiller, comment parler etc... Tout ceci dans le but d'éviter que chacun fasse à sa guise et que l'on retourne à l'age de pierre. Cela dit à cause de tout ça,  on joue des rôles en permanence. On se retrouve avec des dizaines de filtres entre nos pensées et nos actes ou nos paroles. Ces filtres ont de très bonnes raisons d'être là, cependant on oublit parfois leur présence et on se met alors à se mentir à soit-même, on devient le simple clone de son voisin... Grace à ce voyage j'apprends peu à peu  à regarder ce qu'il y a derrière chacun de ces filtres et me voir tel que je suis sans peur du ridicule. Mais ma route est encore longue... C'est comme ca que l'art intervient dans mon voyage à travers la voie que j'ai choisie: l'improvisation. La signature d'un artiste est l'itinéraire de sa vie. Il n'y en a pas deux qui soient identiques. C'est tout simplement la théorie du chaos. La turbulence de la vie nous amène tous sur des chemins différents qui s'écartent au fil du temps. En mettant bout à bout des choses prises en chemin on obtient un produit unique, un rassemblement d'influences liées et deformées par du ressenti et de l'imagination: une création artistique. C'est une belle facon d'exister à mes yeux. C'est même peut être la seule façon d'être vraiment humain... Parce sans ça que sommes-nous? Des crabes qui font des boulettes?...

Bon une autre question sur laquelle j'ai avancé: Qu’est-ce qu’un voyage ? Ce que j'appelle "voyager" aujourd'hui c’est le fait d’avancer dans cet immense espace mais pas uniquement dans sa dimension géographique, dans toutes les autres aussi. Voyager c’est prendre conscience que l’on est vivant et essayer de vivre le mieux possible. En fait voyager c’est sublimer l’art de vivre tout simplement. En ce sens il est donc possible de voyager sans se déplacer géographiquement. Pour ça il faut quand même avoir envie de se remettre en question pour pouvoir avancer quelque part... 

En tout cas ces 4 termes sont vraiment très liés: Voyage, art, vie et identité.

Si je devais définir l’idiotie maintenant, ce serait peut être le fait de ne plus avancer, de ne plus se remettre en question, de se croire déjà assez loin ou plus loin que les autres. En tout cas c’est comme ça que l’idiotie arrive!

En fait durant tout ce temps, ce que j'ai appris à faire c'est être à l'aise avec moi-même dans n'importe quelle situation et à toujours tirer profit de ma solitude. J'avais déjà ce sentiment avant de partir que l'on est toujours seul au final, même en étant accompagné. On est seuls dans nos têtes, on est seuls à vivre nos vies et voir le monde à travers nos propres yeux. J'ai toujours trouvé qu'il est important d'être à l'aise avec sa solitude, de ne pas avoir peur de se retrouver face à soi-même car c'est comme ça que l'on passe toute sa vie au final. Le but ultime de toutes ces questions existentielles qui peuvent ressembler à des prises de tête infernales est en fait tout simple: profiter de la vie autant que possible. Parfois les questions existentielles n'aident pas à mieux vivre alors mieux vaut les laisse tomber. C'est ca le fil conducteur de ce voyage: me mettre dans des conditions d'inconfort ultime et en tirer des choses positives. Alors pour répondre à la question de "Pourquoi je voyage?". Surement pour réussir à toujours être bien dans ma tête, bien dans mon corps, bien tout seul et bien avec les autres qui qu'ils soient...

Alors dernière question: Qu'est-ce qu'un BON voyage? Ce que j'ai appris pendant tout ce temps grace au résonnement par l'absurde c'est qu'un "bon voyage" (et donc une bonne vie) n'est pas motivé par une quelconque récompense matérielle (photo, souvenir, fanfaronnerie, prestige, position sociale etc...) mais par la transformation lente du voyageur en quelqu'un de meilleur selon sa propre définition.

Quoi qu’il en soit, même ici en Australie mon voyage continue et n’est pas prêt de s’arrêter. Même si je rentre chez moi je voyagerai encore car comme je l’ai dit, je n’ai plus besoin de bouger pour voyager, il me suffit d’être en vie. J’ai appris à vivre ma vie comme un voyage, et mon voyage comme une vie. C’est ça que je voulais dire en disant que je n’envisageais pas d'en revenir.

Allez, une petite annecdote en passant: certains de mes amis-facebook adorent poster de belles phrases pseudo-philosophiques qui me font sourire du genre : « La vie est un livre, ceux qui ne voyagent pas n’en lisent qu’une page » ou encore pire : « Le voyage est la seule chose que l’on achète qui nous rend plus riche »… Je trouve que ces phrases sont de bons exemples pour montrer comment l’idiotie peut frapper à tout instant. Même chez des gens qui voyagent depuis des années! Il est illusoire de penser que l’on devienne meilleur simplement en changeant sa position géographique! Il est encore pire de se croire meilleur que d’autres juste parce que l’on a vu du pays. Car encore une fois on ne voit pas forcément plus de « pages du livre », sans remise en question du moins. C'est comme dire que tous ceux qui n'ont pas les moyens de voyager (la majorité des Asiatiques et Africains) n'atteindront jamais la sagesse des occidentaux qui eux peuvent se permettre de partir en vacances... La vanité est une belle porte d’entrée pour l’idiotie. EnDSCF5703 (2) bref, l’important n’est pas où l'on va, ni ce que l’on accomplit, ni même ce que l’on apprend mais ce que l’on devient.

En tout cas pour ma part, voilà donc où j’en suis aujourd’hui, j’espère en être un peu plus loin demain.

Bon, pour finir je sors un vieux dossier : cette sublime photo de moi-même (ci-contre). C'est la premiere photo que j'ai postée dans ce blog. Elle a été prise avant de partir et publiée dans le très prestigieux magazine gratuit « cité-Echirolles »... Il m’est très difficile de ne pas rire en la voyant aujourd'hui. La photo est évidemment complètement posée. Je fais semblant de marcher à la montagne avec mes chaussure bien blanches, ma guitare à 700€ et mon sac à dos vide et détaché. Le parfait avatar de l’homme que j’aurais voulu être à cette époque... Bref, quand je regarde cette photo je me dis « Qui est ce mec ? ». Est-ce moi ?...

Oui… Mais un peu moins qu’aujourd’hui.

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3 novembre 2012

Extras

Bonjour à tous!

Eh oui, en fait quand y'en n'a plus, y'en a encore! Même si j'ai décidé d'arrêter la partie du blog où je raconte ma vie, il me reste encore pas mal de choses à dire et à publier. Je viens notament de mettre en ligne les dernières photos de PNG et un album sur l'Australie, un bien joli pays dans lequel j'ai déjà passé plus de deux mois mine de rien... Il est d'ailleurs possible que j'en publie un deuxième un de ces quatre. J'ai aussi ajouté pas mal de photos de ptites fleufleurs et ptites bêbêtes dans l'album du même nom... Mis à part ça j'ai prévu de publier encore pas mal d'articles notament des interviews que j'ai donné, des instruments à corde pincées que j'ai découverts et aussi quelques réflexions sur le voyage en général. Sans oublier quelques albums à thème et les vidéos bien sûr! Donc en fait il y a encore pas mal de choses à venir et tout ceci sera publié dans la catégorie "extras".

Il est possible aussi que le projet guitar sunrise ressurgisse d'ici quelques temps sous une autre forme, je vous en tiendrai informé sur ce blog.

Voilà! Sinon sachez que je ne me suis jamais forcé à publier quoi que ce soit sur ce blog, tout a été fait avec grand plaisir et uniquement lorsque j'en avais envie (ce qui explique peut-être les longs moments d'absence...). Ce fut donc bien agréable de tenir ce blog et j'espère qu'il était tout aussi agréable à lire. Merci à tous de m'avoir suivi et encouragé, c'était vraiment que du bonheur!

A bientôt!

Yohann

29 octobre 2012

Australie – Songes d’une nuit de printemps

Un vent frais souffle sur Byron Bay ce soir-là. Les passants se pressent de bar en bar au lieu de trainer dans les rues comme à l’accoutumée. Mes mains froides reposent avec hésitation sur les cordes rouillées de ma guitare. Mes songes voyagent dans le temps jusqu’à 20 minutes plus tôt alors que je marchais dans la rue comme n’importe quel passant. Errance de fin de soirée dans une ville méconnue en quête d’une animation-surprise. En d’autres termes, occupation anodine de tout globe-trotter… Les concerts de bar se terminent et les musiciens de rue se font moins nombreux. Mes amis sont déjà partis se coucher et l’idée de les rejoindre est vraiment tentante. Mais ce soir j’ai envie de changer un peu, de tenter des trucs inhabituels, d’oser. Il y a trop longtemps que je n’ai rien osé de culotté et il est temps de me rappeler pourquoi je fais ce voyage. Ce qui m’amène donc à ce banc où je suis assis. Mon chapeau est posé par terre à mes pieds. Saut arrière vers le jour où la providence a placé sur ma route ce chapeau moche et sans forme à Bornéo. Il désormais devenu mon chapeau porte-chance et ne me quitte plus. J’y ai placé 4$ en faisant croire que quelqu’un d’autre les y a mis. Saut arrière jusqu’à la veille. Assis sur ce même banc entouré d’amis je joue de ma petite guitare pour passer le temps lorsqu’un mec un peu éméché débarque et me demande si je sais jouer du Green Day… Evidemment j’ai passé tout mon lycée à en jouer alors je lance un gros classique pour lui faire plaisir : Basket case. Il se met à danser et brailler comme tout bon mec bourré aurait fait. Puis soudain il dégaine un billet de 10$ et le flanque sur mon genou avant même la fin du morceau.

Moi : « Nan, c’est bon je fais pas ça pour ça ! »

Lui : « Ben si ! Tu joues dans la rue c’est normal d’être payé ! Joue plutôt un autre morceau ! »

Encouragé par ses amis et les miens on enchaine avec d’autres grands classiques de Green Day puis NOFX, puis un couple demande du Bob Marley, un autre veut du Manu Chao. Tout le monde chante comme porté par une vague. Au bout du compte je me retrouve avec exactement 34,8$ sur les genoux ce soir-là et tout ça juste en braillant des chansons connues entre amis. Ca fait réfléchir…

Je suis donc de retour sur ce même banc, mais seul. Aucune vague pour me porter, personne pour me dire quoi jouer. Je souffre du pire mal d’un musicien : ne pas savoir quoi jouer… Et du trac aussi pour être honnête. Ce qui est stupide puisqu’il n’y a pas vraiment d’audience. Ok on se détend, je sais forcément quoi jouer puisque je passe ma vie à jouer dans mon coin comme un autiste. Le vrai problème c’est plutôt que j’ai honte de jouer mes trucs d’autiste. Bon tant pis je compte jusqu’à trois et j’y vais… 3 ; 2 ; 1 et bim Fausse note ! Je ne sais même pas comment une note toute seule peut être aussi fausse. Saut en arrière jusqu’au mois de Janvier. Je rencontre Jerry Kamit le génie du Sape de Bornéo, je l’enregistre alors qu’il joue le tube Orang Ulu « Datung Julut » et j’en tremble tellement je trouve ça beau. C’est ce morceau que je décide de jouer sur mon banc ce soir là. Saut arrière vers quelques années plus tôt aux folies Bergères de Paris, John Butler joue « losing you » morceau qui ne quittera plus mes esprits par la suite. Ce morceau se mélange à celui de Jerry Kamit dans ma tête. Ils sont tous les deux sur la gamme de Mi majeur. Une gamme facile, je ne la connais que trop, je ne peux pas me tromper. Pourtant je suis nerveux j’ai froid, je ne joue pas assez fort j’ai les doigts engourdies. Saut arrière d’un mois et demi vers cette ferme organique au nord de l’Australie où j’ai travaillé en échange d’un hébergement et de repas gratuits. Je revois ma polaire qui doit encore être étendue sur ce fil où je l’ai oubliée. Saut vers quelques semaines plus tard sur la Sunshine coast où ce mec m’offre son vieux sweat-shirt en laine détendu avec du jour entre chaque maille, celui que je porte ce soir là sur mon banc et qui laisse passer ce vent qui me glace les côtes. Je dois vraiment avoir l’air crispé alors je lève la tête, je regarde les gens qui passent, je me demande quelle tête il faut faire pour avoir l’air naturel, je tente un regard de côté l’air poétique... Et bim, je me trompe d’accord. 4 fausses notes d’un coup juste au moment où des gens passent. Shit ! Ok, je redouble de concentration. Enfin j’essai… A la place je redouble ma nervosité. Au lieu d’avoir froid j’ai maintenant trop chaud. Mon cœur bat fort, mes aisselles commencent à transpirer et mes doigts deviennent tellement moites que j’ai l’impression que mes cordes rouillent 1000 fois plus vite que d’habitude. Je n’écoute même pas ce que je joue. Ok, ça va pas du tout ! Bon,  je baisse la tête et ferme les yeux. Je sais jouer ce morceau bordel ! Et je sais que je le sais. Saut arrière vers cette île Indonésienne où j’ai passé des nuits à improviser sur ce morceau. J’y ajoute mes chichis, un peu de gamme pentatonique, des plans à la Hendrix, ces sons empruntés à des guitaristes Irlandais, ces arpèges que j’ai appris lorsque j’étais encore en primaire. Tant pis pour les passants, je joue comme si j’étais seul. Parfois j’entrouvre les yeux, je vois des jambes qui s’agitent sur le bitume. Certaines s’arrêtent parfois brièvement puis repartent. J’entends quelques pièces tomber sur mon chapeau whoo ! Je lève la tête pour dire merci à cette maman et son enfant. Tiens ? Qu’est ce qu’un enfant fait là à cette heure-ci ? Ils sortent sûrement du restaurant… Est-ce qu’on m’entend dans le restaurant ? Est-ce que je joue assez fort ? Hmm en tout cas je vais un peu vite je devrais ralentir… Oui mais ça va s’entendre... Oui mais t’façon personne ne m’écoute… Et le moteur de cogitation s’enflamme à nouveau. Alors je refais abstraction des passants et redeviens autiste. Je finis par me calmer, je reprends le contrôle, je joue comme à la maison. J’improvise sur une grille d’accords connue, je tempère ma prise de risque, je ne m’éloigne pas trop des sentiers battus… Mais un peu quand même pour que ce ne soit pas trop ennuyeux. Une fois calme et serein je me permets de prendre du recul sans soucis, je suis plus alerte sur ce qu’il se passe autour. La rue est toujours paisible. Le trottoir est toujours aussi immobile, le vent envoie tranquillement ses petites bourrasques habituelles. Je fais partie du décor…. En fait, il n’y a aucune raison de paniquer, l’agitation n’existe que dans ma tête. Je ne sais pas depuis combien de temps je joue mais il est peut-être temps de terminer le morceau en douceur… Voilà, tout va bien. Rien d’anormal dans la rue. Une copine Italienne est arrivée entre temps et m’applaudit en guise de brise-glace pour dire bonjour. Ok, toujours rien d’anormal… Puis il y a cette fille qui vend des bracelets quelques mètres plus loin dans la rue. Elle se lève et vient déposer quelques pièces dans mon chapeau porte-bonheur en souriant. Elle a été témoin de toute la scène… Elle est Française et me pose plein de questions. Tu viens d’où ? C’est quoi ce morceau que tu viens de jouer ? Tu joues quoi comme style de musique ?…

Attend une minute, d’habitude c’est moi qui pose toutes ces questions. C’est moi qui fais le projet guitar-sunrise et qui interviewe des guitaristes… Comment en suis-je arrivé là ? Après 10 secondes de cogitation la vérité éclate et fige le temps et l’espace. Cette fille continue de me parler mais je ne l’écoute plus, je me contente de lui offrir un sourire de façade niait. Je viens de comprendre la clef de l’intrigue du film de ma propre vie. La réponse à pourquoi je suis là, pourquoi ce projet, pourquoi tout ce chemin. La réponse est d’une simplicité outrageuse : je suis parti offrir à d’autres l’attention que j’aurais toujours voulu que l’on m’offre. C’est aussi bête que ça. Imaginez un mec qui débarque du bout du monde pour vous dire qu’il vous trouve génial alors que vous jouez vos propres chichis d’autiste. Le rêve ! Et j’en rêvais secrètement sans même me l’avouer. Je viens de franchir la simple petite barrière qui m'en séparait : affronter le regard des autres. Personne ne vous encourage à nager avant que vous ne sautiez dans l’eau...

La vendeuse de bracelet s’en va, ma copine Italienne s’installe à côté de moi et me raconte sa journée. Je fais semblant de l’écouter. En réalité je suis focalisé sur ces pièces de monnaie que je viens de gagner. Une pièce de 50 et deux pièces de 20 centimes. Les pièces les plus banales du monde et en même temps les plus belles que j’ai jamais vues. J’ai envie de les accrocher à mon coup en pendentif comme le sous-fétiche de Picsou. A la place je les mets dans une poche à part de mon logo6 copie (1280x960)porte-monnaie. Je ne suis pas superstitieux mais j’aime bien donner de l’importance à quelques objets de temps en temps pour me rappeler certaines leçons…

Le lendemain je quitte Byron Bay à l’aube. Je marche sur cette route vers le sud, direction Sydney. C'est une belle matinée de printemps avec des odeurs d’herbe fraichement coupée, de l’humidité, du pollen dans l’air qui annonce l’été et ce vent frais qui murmure à mon oreille que tout est possible. Le soleil vient de se lever. Il est encore très bas au dessus de la mer et baigne le paysage d’une lumière orange. Mon ombre est infiniment longue et pointe vers l’ouest comme un doigt moqueur. Le projet guitar sunrise ne m’amène plus vers le soleil levant, j’ai changé de direction. J’imagine les montagnes de Papouasie derrière moi qui me regardent m’éloigner de haut. Derrière elles l’Asie pose sa question préférée : « Where you go ? ». Un peu plus loin derrière l’Europe essaie de regarder par-dessus son épaule mais a du mal à comprendre ce qu’il se passe… Je savoure ce doux paradoxe entre l’envie de retourner vers les endroits et les gens que j’aime et celle de continuer ma route. Je me promets de gagner d’autres dollars comme ceux que j’ai gagnés la veille :PA260287 en faisant ce que j’aime.

Il y a longtemps que je me demande comment terminer ce voyage en beauté. Ce matin-là je réalise enfin ce que je suis en train de vivre. Ce n’est pas la fin d’un long voyage, c’est le début d’un autre encore plus long.

C’est pourtant ainsi que se termine le projet Guitar Sunrise. Du moins, sous forme de blog. Peu à peu ce projet est devenu ma vie et ma vie est devenue ce projet. Je vais donc continuer de la vivre mais simplement arrêter de la raconter…

25 octobre 2012

Papouasie Nouvelle Guinée - Lae

 

Du jeudi 16 au dimanche 19 août
Me voici donc débarquant avec ma maison sur le dos à Lae, l’une des villes réputée comme les plus dangereuses de PNG. Me voyant tout seul etP8180911un peu perdu des vigiles de supermarché me proposent gentiment leur protection car j’attire beaucoup de regards. Peu de temps après Mikal arrive. Une jeune Américaine très jolie qui travaille pour une ONG locale et qui m’hébergera durant mon séjour. Je monte encore d’un cran en termes de niveau social : celui des expats. Elle habite une immense maison dans une  jolie résidence surveillée. Un couchsurfer Australien Aaron est hébergé en même temps que moi. Il est ici pour faire un documentaire sur le système de santé du pays et le manque cruel de médicament dans la plupart des hôpitaux. C’est également un très bon guitariste à ses heures perdues et on s’entend à merveille.
Ce sont mes derniers jours avant mon entrée en Australie. Même si mon aventure est censée P8180854continuer là-bas, je ne peux m’empêcher de sentir que quelque chose se termine. J’aimerais pouvoir ralentir le temps... Pendant deux jours je vagabonde seul dans les rues de Lae, ce qui va à l’encontre de tout ce que l’on m’a conseillé jusque là. Cela dit, Mikal et Aaron le font alors pourquoi pas moi ? D’après eux il suffit juste d’être prudent… J’ai du mal à saisir la différence entre marcher dans la rue prudemment et imprudemment. Mais bon, en réalité comme bien souvent, je ne reste pas longtemps seul. Chaque personne à qui j’adresse la parole devient mon ami et m’accompagne, ce qui est assez agréable.
Un peu par piston j’obtiens un entretien non-officiel avec le chef du département mécanique de l’université de Lae pour discuter d’un éventuel poste d’enseignant-chercheur. Il est très enthousiaste et le boulot est plutôt intéressant… Vivre en PNG un jour ? Pourquoi pas… Je garde cette option sous le coude.P8170808
Puis Aaron et moi sommes invités à passer deux jours chez les parents de Stan, le copain de Mikal. Sa famille a immigré d’Australie deux générations avant lui. Ce sont les premiers Papua-New-Guinéens blancs que je rencontre et leur vécu est évidemment hors du commun. Ils habitent les montagnes sur les hauteurs de Lae et tiennent une immense ferme de poulet qui fournit la plupart des supermarchés de PNG. Je monte encore un cran au-dessus en niveau social. Leur maison est une sorte de musée-habité. Bibliothèque gigantesque, œuvres d’art provenant de partout en Asie et le pacifique, vue imprenable sur les montagnes et endroit parfait pour profiter de la nature. Ils nous offrent des repas de haute-voltige avec des desserts sublimes et même du vin, ça faisait  vraiment longtemps... Bref, un endroit où j’aimerais que le temps ralentisse encore plus.
P8180915Clara la femme de ménage nous amène faire un tour dans la nature luxuriante, elle nous montre les recoins de leur propriété. Ici tout le monde sait où commence et se termine les terres de chacun avec précision, même s’il n’y a pas de limites physiques entre elles. Le simple fait de cueillir une baie chez le voisin peut créer d’immense conflit. On ne plaisante pas avec ça ! La famille de Stan possède carrément un ruisseau. Même s’il s’écoule chez les voisins il leur appartient… Pendant qu’Aaron et Clara discutent en marchant devant moi je traine à l’arrière à examiner chaque feuille et chaque fourmi en totale autisme, histoire de profiter à fond de la nature un dernier coup. Je rencontre la plus grosse araignée que j’ai jamais vue, des plantes extraterrestres et des «tree kangaroos» de très jolis animaux entre les kangourous et les ours qui vivent dans les arbres. C’est assez fascinant.
On visite aussi la ferme de poulets évidemment et ça change beaucoup mon point de vue sur la production massive d’œufs et de viande… C’est P8190920assez loin de l’atrocité que l’on m’avait vendue jusque-là. C’est aussi sûrement moins intensif que les fermes occidentales qu’on voit dans les documentaires-choc.
On passe ma toute dernière soirée à boire des bières, manger un barbecue et sortir regarder un match de rubgy Australie-Nouvelle-Zélande dans le pub d’un hôtel d’expat. Une soirée à l’Australienne ! L’ambiance est super, on s’amuse bien…
Et puis ça y est, l’heure de dormir arrive comme ça sans prévenir. Je n’ai plus qu’à me réveiller, grimper dans un avion et hop je suis en Australie ! Voilà, j’ai longtemps rêvé de faire ce long voyage qui me mènerait jusque là, j’ai même rarement envisagé sérieusement  ce que pourrait être ma vie après. Et là ça y est, j’y suis... Parfois des semaines et des mois s’écoulent sans que l’on ne s’aperçoive de rien et puis un jour comme ça, il ne vous reste plus que quelques heures de sommeil avant la fin d’un rêve. Bien sûr, comme d’habitude en quittant un pays pour un autre il y a une certaine excitation. Cependant ce soir là il y a clairement une grande partie de moi qui n’a pas envie d’aller en Australie.
Ceci confirme bien ce vieil adage qui dit que la chose la moins importante dans un long voyage c’est sa destination.

10 octobre 2012

Papouasie Nouvelle Guinée - The Highlands

Du lundi 13 au jeudi 16 août

Les « Highlands » de Papouasie Nouvelle Guinée (« Hauts plateaux ») sont l’équivalent de la région de Wamena enP8130650Papouasie occidentale. Les deux styles de vie étaient jadis similaires, avant le tracé de frontières fictives entre la PNG et l’Indonésie. Cependant depuis l’établissement de ces frontières, les deux régions ont évolués différemment et c’est assez intéressant à constater. Tout comme en Papouasie occidentale, il y a une sorte de fossé, voire de rivalité entre ceux qui habitent sur la côte et les gens des montagnes. En général les montagnards sont souvent traités de sauvages par ceux d’en bas et ils le leur rendent bien. Il faut dire que les reliefs escarpés des Highlands et le manque de route a tendance à vraiment les isoler du reste du monde. Même entre eux, les communications sont parfois moindres, surtout pour ceux qui vivent loin des routes. C’est ce qui explique le nombre astronomique de langues différentes parlées dans les Highlands. Sur les 820 langues du pays, une très grande partie d’entre elles provient des Highlands (sachant qu’on recense P81407056800 langues dans le monde au total). Aujourd’hui tout le monde est à peu près trilingue et parle au moins le Pidgin. En PNG, environ 80% des terres appartiennent au peuple, c’est l’immense différence avec la Papouasie Occidentale. Ils se sont battus pour leurs terres depuis des siècles et continuent aujourd’hui. Les guerres tribales sont encore très communes, surtout en période d’élection qui viennent justement d’avoir lieu lorsque je débarque. Malgré ça mon impression générale est que les gens sont plus libres ici qu'en Papouasie Occidentale. Ils ont certes pris beaucoup de choses de leurs colonisateurs mais les ont adaptés à leur style de vie...

Mikles et sont cousin Thompson m’accueillent à l’aéroport de Hagen, la ville principale des « west Highlands ». Mikles est mon hôte que mon ange gardien Wikai a contacté pour moi. Un mec génial avec qui je deviens ami. Il est architecte et toute sa famille a une assez bonne situation sociale, je changeP8150760 donc complètement de niveau de vie après le settlement de Nuwigo. Son cousin Thompson est un rugbyman professionnel et donc taillé comme tel. J’apprends d’ailleurs à quel point le rugby est important en PNG. Je rencontre plusieurs joueurs de l’équipe nationale. Certains d’entre eux jouent en France et en Angleterre. N’oublions pas que la PNG est une ancienne colonie Australienne… J’arrive chez Mikles alors que sa famille est en pleines funérailles (qui durent plusieurs jours). Il y a une foule dans leur cours qui crie et pleure aussi fort que possible (c’est traditionnel). La famille de Mikles possède deux maisons « permanentes » faites de matériaux modernes et une honai, maison traditionnelle faite de bois et d’herbe sèche  P8150764comme en Papouasie occidentale. Tout comme dans la région Sepik, leur sens de l’accueil est extraordinaire. Ils ne me laissent rien payer et m'invitent à de super repas. La grande spécialité culinaire est le poulet-frites. Cerise sur le gâteau, leur boisson de référence qui s’offre en guise de bonnes relations ou de bienvenue est le coca cola… Hélas oui, ils sont déjà là ! Mikles me dit même : « Offre une cannette de Coca à quelqu’un et il sera prêt à prendre une balle pour toi ». Mikles me présente sa ravissante petite amie et m’explique en détail les relations hommes-femmes locales qui sont en train de s'occidentaliser. Auparavant il n’y avait pas de concept de « couple » aujourd’hui les mœurs s’occidentalisent peu à peu. Ceci dit les rapports restent relativement platoniques avant l’officialisation par le mariage. On rencontre sa grand-mère, trop chou, elle a de la peine pour moi parce que  j’ai fait une très longue route loin des miens pour venir ici…

On passe des soirées typiques de PNG : P8130677on va voir ses proches et on discute, souvent dans les honai. Mikles me présente son oncle, un autre personnage extraordinaire. Ce mec est tout simplement un ancien braqueur de banque reconverti en chauffeur de bus. Dix ans auparavant son rôle était d’attendre au volant d’une voiture pendant que ses potes ramassaient le magot et puis de mettre les gaz pour échapper à la police. En gros ce mec c’est Jason Statham. Comme il dit « Notre pays est en train de passer de l’âge de pierre aux temps modernes d’une façon ultra rapide, avec toute la désorganisation qui va avec. Il est hyper facile d’en voir les failles et d’en profiter !  Mais ce n’est pas la voie à suivre à long terme…». Chez nous on fait des films sur ce genre de mec, en PNG, on passe des soirées avec eux…Un soir dans leur honai je rencontre un ami de la famille qui faisait jadis partie d’un strin P8130656ban  (« groupes de cordes ») qui ressemble aux groupes que j’ai enregistrés dans les églises de Papouasie occidentale… Il me fait une petite démo que je filme. Malheureusement sans le reste de son groupe, le rendu n'est aps exceotionnel mais ça reste intéressant. Lorsque je parle à Mikles de mon projet guitar sunrise, il met en place tout son réseau pour me faire rencontrer un Strin Ban au complet. Malheureusement je n'aurai pas le temps de les rencontrer. On fait beaucoup d'échange de musique avec Mikles. Je suis très surpris car tout ce qu’ils appellent « traditionnel » est en fait du reggae. Ke lui prends pas mal de musique de « strin ban » et lui refile du jazz en échange. Il en est ravi car c'est apparement difficile à trouver ici.

Mikles, Thompson et leur bande d’amis s’évertuent à me montrer toutes les belles choses à voir dans leur région. Tôt le matin ils m’amènent observer des oiseaux du paradis, de vraies merveilles de la nature qu’on ne trouve que sur l’île de Papouasie et qui est d’ailleurs sur le drapeau de la PNG. On part dansP8140750 un village reculé rendre visite à la mère de Wikai (mon ange gardien), on visite une fabrique d’excellent café…

Puis je quitte Hagen en bus en direction de Goroka, une ville située plus au nord des Highlands. Les paysages sont magnifiques. A Goroka je suis hébergé gentiment par Japheth, un autre ami de Wikai qui m’accueille comme un roi encore une fois. Je n’ai pas le temps de passer beaucoup de temps avec lui et repars le lendemain direction Lae, de retour sur la côte pour y passer mes derniers jours en PNG.

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20 septembre 2012

Papouasie Nouvelle Guinée - The Sepik, part. 2

Du lundi 6 au lundi 13 août

J’émerge donc dans un nouveau monde : le settlement de Nuwigo. En PNG, un « settlement » est une zone autour des grandes villesP8110578 dans laquelle les gens s’installent et se déclarent chez eux. L’exode rural étant galopant, les settlements grandissent à vue d’œil en PNG. On n’y trouve ni eau courante, ni électricité  mais beaucoup de gens bien débrouillards et une nature très généreuse qui pourvoit entre autre de l’eau et du bois. D’ailleurs me dis que si à la place de bois on se servait de bidons pour construire les maisons, on appellerait ça autrement… La plupart des gens ici n’ont pas de travail et trainent toute la journée à ne rien faire mis à part quelques petits business par ci par là comme ils disent.

Benson accompagné de Vincent et Jordan son jeune cousin me montrent la vie dans le settlement, ils me présentent à tout le monde et je suis hyper bie_DSC0464n accueilli. Bien souvent le fait que je sois Français et que j’ai la même couleur de peau qu’eux crée des manifestations de joie extravagantes. Tous les settlements de PNG sont réputés pour leur immense insécurité et Nuwigo est apparemment l’un des pires, mais ça on ne me le dit pas tout de suite… Où que j’aille je suis escorté par Benson et d’autres amis comme de véritables escadrons de vigiles. Ils me font visiter Wewak, le centre-ville, leP8070456 marché, le bord de mer, l’hôpital où travaille la femme de Benson : Matilda. Au bout d’un moment je craque, il faut que je mange ! Ils m’emmènent dans une épicerie où je saute sur un morceau de poulet avec du riz qui me coûte dans les 6€, mon repas le plus cher depuis des mois. Eux refusent catégoriquement de partager mon poulet et se contentent de bouts de pain. Je continue d’halluciner… On passe une superbe après-midi sur une plage de rêve où les Américains et les Japonais se sont jadis battus. Dans la soirée ils me motivent pour aller à Ambunti, petit village le long de la mythique rivière Sepik où se déroule un festival local. P8080505 Alors ok, c’est parti pour ma 3ième nuit blanche d’affilé! Vers 22h Benson et moi nous entassons à l’arrière d’un camion et c’est reparti pour 7h de secousses. Je suis assis par terre dans la benne adossé à un bidon avec des enfants sur mes jambes. Parfois on fait des pauses et tout le monde sort s’allonger sur le goudron au milieu de la route pour se reposer un peu. C’est l’occasion pour moi de rencontrer Ole, un Norvégien qui a du mal à se fondre dans le décor… Vers 5h du mat on arrive au bord de la rivière Sepik. Benson me confie à Justin un ami qu’il rencontre par hasard et repart dans la foulée vers Wewak avec le même camion. Je n’ai jamais vu personne doté d’une telle résistance physique… Je me retrouv_DSC0470e donc à l’aube à remonter la rivière Sepik avec mes nouveaux amis Justin et Ole sur une pirogue à moteur…

Le « crocodile festival » d’Ambunti est l’occasion de voir une grande partie des tribus de la  région Sepik exécuter leur chants et danses traditionnelles qu’on appelle des « sing sing ».  Chaque tribu possède ses propres costumes ainsi que leur totem (celui d’Ambunti est le crocodile). Une fois encore, le trésor est d’interagir avec ces gens qui ont tous un vécu et des histoires exceptionnelles à raconter. Ole et moi passons beaucoup à discuter avec qui veut bien nous parler (c’est-à-dire tout le monde). On en apprend beaucoup sur le quotidien des villages, la vie avant les missionnaires chrétiens, la signification des totemP8080488s, le rite du crocodile qui transforme les garçons en homme etc… On est témoin d’un sacrifice de crocodile qui se fait changer en kebab… On finit la soirée à boire des bières avec des locaux dans un « bar de jungle », c’est-à-dire une table en bambou abritée par un toit en palmier qui nous protège d’une pluie diluviale. A tel point que l’hôtel d’Ole nous envoie une pirogue à la rescousse de nuit sous une pluie où on ne voit pas à 1mètre... Je ne sais pas si c’était l’idée du siècle mais en tout cas c’était l’aventure du siècle ! Du coup, Ole me laisse squatter le lit libre de sa chambre à 100€, c’est toujours ça de pris… Autre aventure, pour éviter de payer le repas de l’hôtel, la peau des fesses, je pars en quête de nourriture avec des locaux. On frappe à la porte de service des épiciers qui sont tous fermés en espérant que l’un d’entre eux nous ouvre la porte de ses réserves... On finit avec de délicieux biscuits à l’arôme de bœuf accompagné de corned beef humm ! Le jour suivant se déroule un peu de la même façon sauf que c’est mon anniversaire, alors on boit un peu plus. Et oui 28 ans déjà, un an s’est écoulé depuis la Bulgarie. Ça nous rajeunit pas… On passe la soirée au bord de la rivière à écouter la théorie de Justin disant qu’il aurait trouvé les squelettes de David et Goliath ainsi que la montagne de moïse et qu’en fait tout le peuple d’Israël vient de la PNG qui est en réalité le centre du monde etcP8110570

Suite à ce festival, il est courant chaque année pour la poignée de touristes présents de voler directement de Wewak vers Hagen où se déroule un autre festival encore plus gros. Pour ma part, ayant vu suffisamment de sing sing et trouvant le prix des billets trop cher, je préfère rester avec mes amis à Nuwigo. J'irai à Hagen plus tard pour avoir des billets moins cher. Je passe donc 4 jours merveilleux chez Benson et Matilda à partager leur quotidien et réussis à vraiment m’immiscer dans le rythme de vie papou. Le secret de leur infinie résistance est entre autres de mâcher du buay à longueur de journée, le « mighty power of PNG » comme ils disent. Alors je mâche du buay avec eux. On traine avec les voisins dont beaucoup ont passé le rite du crocodile étant jeunes qui consiste à rester entre un mois et un an dans une maison sacrée à recevoir des leçons de vie strictes et à se faire scarifier le dos jusqu’à avoir une « peau de croP8120589codile ». Pour se doucher, ils creusent un trou dans le sol que la nappe phréatique remplit tranquillement, puis on s’asperge avec une bassine en se cachant derrière des bambous. Pour charger nos appareils électriques on va squatter le bureau de police où on branche multiprises sur multiprises… On passe des heures entières à discuter de tout et de rien. Je leur montre mes vidéos de voyage qui se transforment en projection pour tous les voisins. On me présente Jee, le musicien retraité du settlement qui est particulièrement passionné. On joue beaucoup ensemble et je filme une de ses chansons dans sa langue natale. Le soir on va chercher Matilda qui a coutume de jouer au bingo en sortant de son boulot à l'hôpital. C’est l’occasion de trainer au marché de nuit, de manger des boules de riz, ou du saigo avec du poisson grillé, le délicieux encas local… J'aide aussi beaucoup Benson à faire du business. Je le mets en contact avec mes amis de Papouasie Occidentale pour qu'il leur vende de l'or (la PNG en est remplie), je lui fais découvrir internet et ebay, bon moyen d'importer du matériel indédit en PNG et le revendre... Quand benson n'est pas là, je passe beaucoup de temps avec Matilda, une vraie petite crème qui adore papoter avec moi, qui s'inquiète quand on n'est pas là et qui sourit tout le temps. Pour cuisiner on dépose une marmite sur un feu de bois par terre. Je réussis à leur faire de sublimes spaghettis bolognaises avec des nouilles indonésiennes à la place des spaghettis et du corned beef avec des tomates à la place de la bolognaise... Splendide!

Près du marché, Benson me montre le lieu où il fut un jour poignardé à mort et dû partir chercher de l’aide et portant ses intestins... Il faut dire qu’il l’avait un peu cherché vu qu’il avait brulé la maison de ses agresseurs quelques semaines plus tôtP8120611… Personne n’est un saint en PNG, les deux seules lois qui prévalent sur le reste sont les suivantes : la première est la loi du « wantoc », la deuxième est « œil pour œil, dent pour dent ». En Pidgin, « wantoc » veut dire « frère » au sens large : cousin, oncle, famille éloignée, personne parlant la même langue, amis etc… La loi du wantoc est un système de solidarité : il faut toujours aider un proche dans le besoin, toujours ! C’est plus fort que tout le reste, la police, la justice, la politique… Ce très beau système atteint un peu ses limites lorsque les gens qui ont du boulot finissent par payer pour ceux qui ne font rien. L’argent est gérée de façon collective ici. Quant à la deuxième loi c’est simple, si tu blesses quelqu’un d’une façon ou d’une autre tu devras payer, en argent ou en donnant de ta personne. Cette idée est beaucoup plus suivie que celle de tendre la joue gauche ici, bien que tout le monde soit chrétien… L’histoire de Benson n’en est malheureusement qu’une parmi des dizaines que j'ai entendues... La paranoïa s’installe très vite mais le système du wantoc permet de se sentir protégé par les siens. L’autre problème omniprésent dans les settlements est l’alcool et le fait que beaucoup de gens se promènent avec des machettes. L’un et l’autre ne vont pas bien ensemble. A quelques reprises je me suis senti très content d’être accompagné ! Ici on ne boit pas pour rigoler mais plutôt pour se la coller sévère... Un jour alors que j’invite Benson à boire une bière, il la finit cul-sec en 2 secondP8130628es et me confie : « D’habitude, mes copains refusent de boire avec moi parce que quand je suis bourré j’ai tendance à taper tout le monde… ». Oups me dis-je…

La violence en PNG est souvent le sujet dont on parle le plus, surtout pour nous occidentaux parce qu’on n’y est pas habitués. Moi-même je me rends compte que j’en parle beaucoup… C’est pourtant dommage parce que ça masque un peu la beauté de ce pays. La violence est vraiment loin d'être partout, c’est juste la façon locale de régler les conflits. La grande plupart du temps il n’y a pas de conflit et tout va bien. C’est juste qu'ici tout est beaucoup plus intense pour le pire et pour le meilleur. Les liens que j’ai créés à Nuwigo sont très forts. J’ai vraiment été accueilli et traité comme l’un des leurs. Au moment de quitterr Wewak à l'aéroport, j’ai vécu les adieux les plus tristes de tout mon voyage. C’est quand même signe d’un très bon séjour ! J'ai toujours de gros contacts avec mes amis de Nuwigo et il est clair qu'un jour j'y retournerai ou ils viendront me voir quelque part. En ce moment Benson est en expédition dans la jungle pour chercher de l'or. J'ai des coups de fil de temps en temps qui me font rêver de le rejoindre! Mais bon, je m'envole pour la régions de Highlands, un autre coin incontournable de PNG, on ne peut pas à la fois partir et rester, c'est l'immense dilemme du voyage...

15 septembre 2012

Guitar Sunrise Project Part 4 - Macedonian Blues

2 septembre 2012

Papouasie Nouvelle Guinée - The Sepik, part 1

Du Jeudi 2 au lundi 6 août

La Papouasie Nouvelle Guinée, un pays dont je ne sais rien ou peu, un nom qui me fait rêver depuis l’enfance et ce fameux gag de GastonP8020289 (2)Lagaffe sur les papas Papous à poux (que ceux qui connaissent se manifestent). Depuis ce temps, la PNG n’est qu’un nom qui m’évoque un peuple exotique très très lointain et difficile à rencontrer…

Alors que je m’apprête à en franchir la frontière, j’énumère mentalement le peu de choses que j’ai entendues à son propos par-ci par-là : Alors…’est un pays d’une immense diversité éthnique: plus de 820 langues différentes correspondant à peu près au nombre de tribus, un trésor de nature encore intouchée, des mines d’or, de belles montagnes, des côtes sublimes… Hmmm, cool! Bref, quoi d’autre ? C’est un pays cher car pas ou peu de routes mais des bateaux ou des avions très coûteux à la place, peu de tourisme aussi, donc hôtels ultra chers… Quoi d’autres ? Ah oui, c’est un pays dangereux aussi parait-il, surtout dans cette période d’élection : guerres tribales, agressions, viols, crime organisé… Whoo ! LaP8050388 spirale de la paranoïa recommence, plus fort que jamais. Bon, quoi d’autres ? Ah oui, on m’a fortement conseillé de planifier au maximum mon voyage à l’avance pour éviter de dépenser trop d’argent et être certain d’être en sécurité en permanence… Et c’est bien là que le bât blesse : à ce stade du voyage tout l’intérêt de continuer est justement de ne rien planifier. Alors tant pis je n’ai rien planifié rien mis à part deux choses : Mon billet d’avion vers l’Australie le 19 aout et le contact d’un pasteur qui est partant pour m’héberger à Vanimo, la première ville après la frontière. Pour le reste : improvisation. Je me permets ce freestyle car je sais que j’ai une bonne étoile qui veille sur moi : Wikai, l’ami d’une amie qui habite à Port Moresby (la capitale). Je ne l’ai jamais rencontré mais il est prêt à me trouver des hébergements chez des amis à lui un peu partout dans le pays m’a-t-il dit… Hmm ça devrait le faire me dis-je. Et d’ailleurs, ça l’a fait, puisque je suis toujours P8030314vivant !... Aucun suspense.

Cela dit à deux pas de la frontière un petit coup de flippe me prend quand même du genre « Et si j’avais tort et que ça se passait très mal… ? ». Mais je connais ce genre de situation désormais. L’unique secret est de ne jamais stresser. Ce stress inutile m’a coûté 100$ dans un mauvais taux de change lors de mon entrée en Iran… Merci j’ai appris la leçon.

Je traverse donc la frontière plutôt relax. De toute façon il est difficile de traverser cette frontière autrement puisqu’elle est elle-même ultra relax. Tellement relax qu’en fait on est même pas obligé de passer par la douane car les locaux entre Jayapura et Vanimo peuvent circuler librement. Mieux vaut faire tamponner son passeport quand même évidemment…

Et voilà, j’y suis ! Après autant deP8030292 temps passé dans un pays, le passage d’une frontière est toujours accompagné de sentiments partagés. Je suis à la fois heureux et excité d’arriver dans un nouvel endroit et triste de quitter l’Indonésie et tout ce qui va avec… Comme partout je m’y étais créé un petit confort, je connaissais la langue, le taux de change, le prix de la vie, les mœurs etc… Je hais cette partie de moi qui se morfond dans ce petit confort mais je ne peux que constater qu’elle existe. Elle crée en moi une immense flemme d’apprendre le Pidgin, la langue locale, sorte d’Anglais très déformé, après avoir fait tant d’efforts pour apprendre le Bahassa Indonesia… Cela dit une grande partie des gens parlent Anglais (l’autre langue officielle). Cette frontière a une grande portée symbolique : je change officiellement de continent. Adieu l’Asie ! En fait je suis déjà en Océanie d’un point de vue géographique depuis quelques temps, mais cette fois me voici clairement dans l’Océanie politique.P8050337

Après quelques péripéties je rencontre enfin le pasteur Nehemiah qui m’accueille dans son église des « Assemblists Of God ». Je reste avec lui 3 jours le temps de trouver un moyen de bouger vers la ville suivante : Wewak. Je ne suis qu’à une cinquantaine de km de Jayapura et pourtant tout semble différent, même la nature et le climat (plus frais). La PNG m’évoque un mélange de plusieurs endroits où je suis déjà allé. Mes alpes natales, le Rwanda, une touche d’Australie, un soupçon d’île d’Oléron (ça j’ai du mal à l’expliquer). Les plages sont comme celles des magazines, très longues, sable blanc, eau chaude, palmiers, quelques jolis rochers, j’y passe pas mal de temps. Le reste de mon temps je le passe avec le pasteur avec qui j’ai beaucoup de discussions intéressantes. Son travail consiste à écrire des prêches afin d’être prêt pour le jour de l’église. Ainsi, à la manière d’un auteur tourmenté, il affine sa prose chaque jour en lisant la bible qu’iP8050348l connaît quasiment par cœur. Il me demande de lui expliquer quelques principes d’aérodynamique afin de les incorporer à ses textes sous forme de métaphores… Vachement balèze. Il est aussi très friand de films. Je lui transfère des dizaines de giga de tout ce que j’ai sur mon disque dur. Il passe des nuits blanches à s’en enfiler 5 ou 6 de suite. J’ai un peu l’impression d’être contre-productif pour lui parfois… Evidemment je ne résiste pas à la tentation de lui transférer « Brokeback Mountain », pour l’ouverture d’esprit. Je n’ai pas encore eu de retour mais je serais curieux de savoir ce qu’il en a pensé.

Deux fois par jour, à des heures aléatoires on nous sert un repas fait par « les boys » comme il les appelle, des jeunes gens qui sont là pour aider. Le repas est toujours du riz blanc assaisonné de nouilles, improbable ! Heureusement qu’on a ça car la nourriture est très difficile à trouver et très chère le cas échéant. Le marché est entièrement vidé dès 9h du matin et après ça, le moindre repas frugal coûte 10€. Je n’ai toujours pas compris comment survivent les gens à Vanimo. Il n’y a pas d’agriculture commerciale, chacun produit pour soi-même, personne ne travaille vraiment, mais tout le monde réussit à avoir un peu d’argent et survivre. En fait l’endroit est complètement enclavé et très dur à ravitailler.P8050355

Un beau matin, après une nuit blanche à l’attendre, un bateau est enfin disponible pour aller vers Aitape, escale sur la route de Wewak. Le bateau en question est en fait une grosse barque à moteur sur laquelle on est censés monter à 10 avec nos sacs. J’ai du mal à comprendre comment… Ben en fait c’est comme tout, quand on pousse, ça rentre ! Ma bonne étoile Wikai m’a un peu lâché ce jour-là, du coup j’ignore où je vais dormir en arrivant à Wewak…

On longe une côte magnifique avec des groupes de dauphins qui s’amusent au loin. Les gens qui m’accompagnent sur la barque sont ultra sympa. Je l’ignore encore mais ils sont sur le point de devenir mes meilleurs amis : Benson, Vincent, Malik et Philip. Alors que l’on arrive au très joli village d’Aitape je leur demande où ils souhaitent dormir car on est censé attendre un bus pendant un temps indéfini, peut-être toute la nuit.

« -Oh, on compte juste trainer ici sur la pelouse en attendant demain… 

-Puis-je me joindre à vous ?

-Avec plaisir si ça ne te dérange pas de ne pas dormir dehors. »

Je suis très vite séduit par ces personnages qui ont cette optique de voyage la plus pure qui soit : « Quand on n’a rien, on n’a rien à perdre. » Ils ont tous un vécu hors du commun. L’histoire de Vincent en particulier rassemble à elle seule une tonne de problèmes intrinsèques à la PNG. Il a 19 ans et a dP8050361éjà passé 5 ans en prison. En effet, à l’âge de 13 ans, alors qu’il conduisait la voiture de son père pour amener quelqu’un à l’hôpital (l’histoire commence bien…) des hommes armés sortent de nulle part pour lui bloquer la route et probablement le détrousser. Son réflexe est de foncer dans le tas… Il se fera arrêter et emprisonner 5 ans pour ça. Aujourd’hui Il m’en parle avec une immense décontraction du genre « C’est pas si grave… Ça arrive ! » Tandis que je le regarde avec des yeux écarquillés en remettant en question l’univers cosmique tout entier dans ma tête…

On passe la journée à attendre tranquillement qu’un bus nous amène vers Wewak. On se raconte des histoires, ils m’apprennent un peu de Pidgin et on mâche des noix de pinang (qu’ils appellent Buay ici)… Je savoure énormément la facilité que l’on a à se comprendre. Ça change beaucoup des Indonésiens et leur manie de toujours répondre à côtés des questions. Je me rends compte que je viens de passer 2 mois à faire des gymnastiques mentales pour bien tourner mes phrases dans le but d’obtenir de vraies réponses… Ici, non ! Ce n’est pas seulement le langage mais tout ce qui va avec. Les comportements, les mouvements, le sens de l’humour, la façon de répondre, tout est plus « normal » qu’en Indonésie! Ca me soulage beaucoup les méninges…

A 23h le bus arrive enfin. Cool me dis-je, en espérant pouvoir ronfler dedans… Sauf qu’en fait le « bus » en question n’est autre qu’un 4x4 avec un grand coffre ouvert. Un pick up quoi. Moi qui croyais avoir touché le fond en termes de conditions de voyage… On se tasse là-dedans à environ une dizaine, plus les sacs, et c’est parti pour 6heures de montagnes russes. Cela dit, la pleine lune baigne les paysages d’une lumière bleue marine et le voyage est sublime, super ambiance malgré l’inconfort. On traverse un nombre incalculable de rivières sans pont. On peut se considérer chanceux car si le débit d’eau était trop fort on aurait dû attendre qu’il baisse, ce qui peut prendre P8050391des jours…

Benson m’offre gentiment de m’héberger chez lui où l’on arrive vers 5h du matin, cassés en trois (enfin moi en tout cas). Comme toute personne censée je m’attends à sauter directement dans un lit et y mourir jusqu’à tard le lendemain. Ben non, on traine, on discute avec ses frères, sa femme se réveille et nous rejoint pour discuter aussi… Lorsqu’il me propose d’aller m’allonger je ne lui fais pas dire deux fois et me transforme instantanément en fétus. Lui en revanche, ne dormira pas de la nuit. Tout de même, avant de fermer les yeux, allongé sur un matelas de fortune dans cette bicoque sur pilotis qui gigote au moindre mouvement, je prends quelques minutes pour essayer de réaliser dans quelle situation improbable je me suis encore fourré.

Deux heures plus tard vers 7h, alors que je dors profondément Benson me réveille :

« Hé, c’est l’heure du café, t’en veux ? »

Je commence à comprendre où je suis : Un endroit où l’on ne dort pas et où l’on ne mange pas… Cool, ça me rappelle mes voyages de jeunesse ! A ce propos, quand ai-je mangé pour la dernière fois ?

26 août 2012

Indonésie – Papouasie – Wamena, retour à l'essentiel

Du mercredi 25 au mardi 31 juillet

Wamena, petite ville au beau milieu de la vallée de Baliem, elle-même au beau milieu de montagnes et forêts encore intouchées parseméDSC_0505e de petits hameaux  perdus au milieu de nulle-part, aucune route n’y mène ni n’en part… Des lieux où le temps s’est arrêté. Il n’y a qu’en Papouasie pour trouver ça.

La ville en elle-même semble avoir poussée toute seule comme un champignon. Elle semble avoir été construite trop vite et arrêtée trop tôt. Elle évoque un peu ces anciennes villes dans les films vers la ruée vers l’or Américaine. Au milieu de ce décor on ajoute des gens qui n’ont rien n’à faire là : Les Papous. Ils sont pourtant chez eux, c’est là qu’est la tristesse. Il y a peu de temps, cette ville n’existait pas et les gens cultivaient juste ce qu’il faut pour se nourrir. Puis on leur imposa un nouveau concept puissant : l’argent. L’idée est simple : si tu n’en a pas, tu n’existes pas…

Débarquant fraichement dans cet endroit iDSC_0189mprobable, je rencontre Theodora, ma nouvelle hôte. Elle est née ici et travaille aujourd’hui pour WWF pour préserver la nature locale. A peine arrivé, elle m’embarque dans un petit village non loin de là avec son 4x4 de fonction. Son rôle est de former les gens à récolter le café qui pousse ici comme du chiendent… Oui car voilà le problème. Les gens sont encore en pleine transition vers ce monde d’argent. Nous autres occidentaux aimons appeler ça « en développement ». Pas encore pleinement entrés dans le monde merveilleux de la consommation, ils n’ont besoin d’argent qu’occasionnellement. Donc lorsque l’occasion se présente ils vont couper des arbres et revendent le bois car c’est de l’argent rapide. Il n’y a donc presque plus d’arbre dans la vallée autour de Wamena. Le café et le miel sont deux produits qui permettent au locaux de gagner pas mal d’argent tout en préservant la nature locale. Oui mais… Les gens habitués à ne cultiver que ce dont ils ont besoin, ont tout sauf envie de se faire suer à récolter ces petites baies rougeP7250053s, ce qui en passant fait criser mon amie Theodora. Une voix en moi crie au scandale. « Fichons-leur la paix ! Ils étaient bien mieux avant !! » Oui mais… Dans un contexte où la Papouasie demande l’Indépendance, où toute la richesse de ses terres ainsi que ses postes clefs sont exploités par d’autres, il est crucial de donner accès à l’éducation et aux soins aux Papous pour qu’ils aient les mêmes chances que les autres. Or tout ceci a un coût. Et au final le café est plutôt une bonne idée pour payer tout ça… En gros, c’est trop tard, les Papous ont déjà un pied dans la spirale de notre système pour le meilleur et pour le pire…

Bref, alors que ce genre d’idées me traverse la tête, me parviennent les accords d’une musique, qui en ce lieu me parait irréelle… Je suis pourtant formel, il s’agit bien d’une guitare ou d’un truc similaire ou ce projet ne s’appelle pas guitar sunrise ! En suivant ces notes et abandonnant Theodora à ses occupations, je péP7250058nètre pour la première fois dans une « Honai », maison traditionnelle faite de bois, de boue et de paille. J’y rencontre un groupe d’hommes éméchés autour d’un seau d’alcool fait maison. L’un d’eux gratte une petite guitare à 5 cordes, faite maison elle aussi. Ils chantent une jolie chanson qui reste facilement en tête. Certains font les cœurs d’autres chantent les paroles. C’est beaucoup plus structuré que nos chansons d’alcoolos à nous ! Le rendu est vraiment très beau. Ils m’accueillent avec le sourire et je fais plusieurs vidéos qu’ils sont heureux de revoir ensuite sur ma caméra… Sublime ! Ce séjour n’aurait pas pu mieux commencer.

Theodora est vraiment la bonne personne à connaître à Wamena. Chaque jour elle m’emmène dans un village avec le 4x4 de son boulot. Lorsqu’elle ne travaille pas, on se balade avec  son scooter. C’est toujours moi qui conduit car en Indonésie, il n’est « pas poli P7260071» qu’une fille conduise un homme comme elle dit… Je suis le dernier à m’en plaindre évidemment. On traverse ces sublimissimes paysages de montagne de village en village, que du bonheur ! On va au marché qui est une merveille lui aussi tellement il est rempli de couleurs, de choses et de gens improbables. Le style local pour les hommes agés, c’est la « Koteka », un cache sexe fait à partir d’un fruit séché en guise d’unique vêtement. En gros ils y a des hommes nus de partout. Le problème dont Theodora m’avait préservé jusque-là c’est que les gens demandent souvent de l’argent en échange de toute photo prise… Oui le tourisme est déjà là lui aussi Alors je ne prends pas de photo au marché.

Un beau matin on part pour une journée de trek dans les montagnes, loin de la ville. On s’élève en altitude, on traverse des rivières, des champs de fleurs magnifiques et des cultures. Tous les gens qu’on rencontre sont d’un accueil extraordinaire, ils approchent de nous en disant « Wha wha wha wha ! » ce qui veut dire bienvenu, ou merci. Ils nous serrent longuement et chaleureusement la main en souriant… Les petits villages de Honai ont des allures de village d’Astérix avec leurs toits en paille, les champs sont délimités par des petits murs de pierre pour éviter que les cochons traversent d’un champ à l’autre. On termine notre périple en fin d’après-midi en atteignant les nuages. On est alors suivis par un groupe d’enfants joueurs la morve au nez... Nous voici dans le minuscule village d’Ugem. On est accueillis dans une Honai un peu plus loin sur les hauteurs par des amis de Theodora. Tout le monde est en cercle par terre autour du feu sous lequel sont enfouies des patates douces. Le grand père (tete) en complètement nu DSC_0281mis à part sa koteka alors que nous avons des polaires et vestes... Une demi-patate suffit à me cimenter l’estomac, j’arrive mieux à comprendre comme ils survivent en ne mangeant que ça. Pourtant la maman continue d’en faire cuire des dizaines dans une grosse casserole d’huile… C’est pour les cochons, nous dit-t-elle, ils sont hyper difficiles et refusent de manger toute patate non cuite ! Les discussions que l’on a avec cette femme sont ultra-passionnantes, surtout lorsqu’elle aborde le sujet des relations hommes-femmes et le fait qu’ils vivent séparés en permanence. Le concept de « couple » n’existe pas ici. La meilleure partie arrive quand on lui demande comment ils font pour faire des bébés quand même… De quoi écrire un super livre d’ethnologie (si ça n’avait pas déjà été fait !). En milieu de soirée, tete s’en va dormir. En d’autres termes il part complètement nuDSC_0397 avec sa canne et sa koteka, affronter le nuit, la brume, la pluie et le froid. 80 ans tout de même… Quelle vie ce mec a-t-il bien pu vivre ?

Le lendemain après une super matinée football avec les enfants, on va au village d’à côté pour y rencontrer un guitariste. Evidemment on est suivi par tous les gosses. On rencontre finalement 2 guitaristes d’environ 12 ans. Ils nous interprètent une magnifique chanson d’église, accompagnés par tous les autres enfants avec le ciel bleu et les belles montagnes en toile de fond... Encore un petit bijou ! J’ai évidemment filmé tout ça et le publierai un jour le temps de rattraper mon infini retard !

Le lendemain est un dimanche, encore un jour du seigneur. On a rendez-vous dans une église catholique cette fois dans un petit village non loin de Wamena. Dans l’église, les chaises ont été remplacées par de l’herbe sèche. Dans le fond, un groupe de musique similaire à celui de Jayapura accompagne toutes les chP7270266ansons. On y retrouve des guitares, des ukulélés et une immense contrebasse faite maison. L’ambiance est différente de celle de la semaine précédente. Personne ne saute à droite à gauche, sobriété catholique oblige… Néanmoins, la musique n’en est pas moins intéressante, c’est même tout le contraire. Les chants sont en Dani, la langue locale. Les chansons ont différentes voix et chacun sait laquelle chanter, c’est vraiment joli. A la fin de la messe, le prêtre me présente à tout le monde encore une fois. Pas de Amen ni d’Alleluyah cette fois… Bon. Par contre tout le monde est motivé pour faire un enregistrement de chanson avec mon microphone. Alors c’est parti je déballe le matos. Mon ptit ordi est posé sagement par terre sur la paille tandis que Theodora prend le rôle de perchiste-porteuse de micro (oui j’ai perdu son pied). Je tente un briefing scabreux en Indonésien pour expliquer comment on va enregistrer, les tests des niveaux que j’ai à faire avant etc… Par miracle ils me comprennent assez bien. Le groupe se met en place en face de moi et le reste de l’église se poste tout autour pour regarder. C’est parti pour un sublime enregistrement ! ToDSC_0352ut le monde chante dans l’église des plus jeunes aux plus vieux. Une fois l’enregistrement terminé je montre la vidéo à tout le monde sur mon ordinateur. Ils sont vraiment contents de se voir et rigolent de timidité. C’est un vrai délice d’observer les expressions sur leurs visages. A la fin tous les hommes me serrent chaleureusement la main avec de beaux sourires et les femmes me prennent dans leur bras en me serrant fort. Encore un moment intense que je ne suis pas près d’oublier…

Pour mon dernier jour à Wamena, Theodora me laisse son mountain-bike tandis qu’elle part au boulot. J’ai droit à un sublime arc-en-ciel en guise d’adieu. Des groupes d’enfants me courent autour en pleine ascension et m’obligent à cracher mes poumons pour éviter d’avoir l’air ridicule. Je termine dans un petit village qui domine la vallée avec de nombreux nouveaux amis souriants. J’essaie de faire dureDSC_0544r chaque instant aussi longtemps que possible car je sais que la fin de Wamena signifie la fin de l’Indonésie…

De retour dans la canicule de Jayapura, je retrouve mon passeport qui m’attendait au consulat décoré d’un joli visa pour la PNG. Je fais une belle soirée d’adieux avec tous mes amis qui finalement commencent à être nombreux. Et puis ça y est, l’heure est venue de partir encore une fois… Ahhh, il y a quelques mois, en quittant ma petite Malaisie-chérie pour entrer dans ce pays en bazar, j’étais très loin d’imaginer que je m’attacherai autant à l’Indonésie. Pourtant je pense pouvoir dire aujourd’hui que je préfère l’Indonésie à la Malaisie. Tout y est tellement plus intense ! Cela dit en termes d’intensité, j’ignorais encore à l’époque que je m’apprêtais à entrer dans LE pays intense par excellence… La PNG.

23 août 2012

Indonésie – Papouasie, chilling out in Jayapura

Du vendredi 13 au mardi 24 juillet

Le bateau vers Jayapura est plus encore plus bondé que la dernière fois. Il n’y a plus de place nulle part, les couloirs, le pont, la cantine, toutIMG_1494est rempli de monde. Je n’ai moi-même pas de place, je squatte par terre dans le couloir et j’ai déjà de la chance. Sur le pont, le sol est couvert de crachats rouges de pinang qui forment une boue rouge glissante avec la pluie, que du bonheur !

L’arrivée est encore plus chaotique que le trajet. On est des milliers à sortir en même temps dans un endroit qui n’est pas conçu pour. La rue devant le port est bloquée pendant quelques heures à cause du monde et du bordel ambiant. Mon téléphone est mort car il est tombé dans l’eau à Serui, je dois pourtant retrouver mon hôte dans tout ce capharnaüm. Pour ce faire je squatte le téléphone des gens… Après des heures de galères je rencontre enfin Vina, une fille d’une trentaine d’année née en Papouasie et originaire de Sulawesi. Elle m’accueille chaleureusement dans son modeste appartement de Kotaraja à 45minutes de Jayapura. Dès la première soirée je rencontre les protagonistes du quotidien que je m’apprête à vivre : Eri, sa jeune cousine avec qui elle vit, Johan, une papoue couchsurfeuse qui squatte là tous les soirs et Glenn, son beau-frère américain… Bref, du beau monde, très sympa. Johan nous amène dès le lendemain danP7140594s son village natal au bord du magnifique lac Sentani. On y goute le fameux « papeda », sorte de glue faite à base de saigo (palmier particulier), on boit du « bobo » bien sûr, on tente une excursion sur une petite barque locale qui chavire au bout de 3minutes… Du coup on se contente de se baigner dans l’eau chaude du lac. Le lendemain on passe une journée à la plage qui est vraiment sublime. Sable fin, eau turquoise, corail, palmiers etc…

Après ce beau week end, la densité d’activité diminue fortement. Je lance la procédurP7140559e pour faire mon visa pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée (PNG). Hum, cette bonne ambiance de consulat où on attend des heures, puis on doit revenir le lendemain, tomber sur des « fermetures-surprise », on doit faire des photos, écrire une lettre de motivation, passer pleins de coups de fil pour savoir si le visa est prêt… Du bonheur en boîte ! Ça m’avait manqué.  J’attends mon visa toute la semaine en vain. Entre temps j’ai plein de projets qui ne voient pas le jour non plus. On me promet pleins de jolis treks dans la jungle « peut-être demain » qui ne se font jamais… Mais ça y est je suis habitué aux « projets à l’Indonésienne », donc plus de surprise... Je prépare mon voyage vers Wamena, dans les montagnes de Papouasie. Le problème c’est que pour y aller il me faut mon passeport, donc j’attends… J’écris un peu mon blog, je trie mes photos et passe des heures à les mettre en ligne grâce aux super-connections internet. Je me fais souvent piéger aussi par la télé de Vina dotée d’un million de chaines qu’Eri regarde en permanence. Il y a toujours un film sympa qui me fait bloquer quelques heures et me légumifie le cerveau.

Vina est une merveilleuse cuisinière, elle nous régale les papilles matin, midi et soir. Du coup un jour pour leur rendre la pareil, je leur fait mes superbe crêpes à la Française. Elles ont un succès bien relatif. Mais bon personne n’a rien recraché donc ils ont dû aimer un minimum comme dirait mon père… En général c’est le soir que se passent les choseP7150641s car les gens travaillent la journée. La chaleur est écrasante et pousse à ne rien faire sous peine de suer à grosse gouttes.

Je rencontre Sury entre temps, une autre couchsurfeuse qui a un groupe d’amis parallèle. En général on se voit le soir, on mange ensemble et… On fait du karaoke bien sur.

Un nouveau week end arrive, synonyme d’activité. On fait un tour sur les superbes îles « Debi » juste en face de Jayapura. La vue est superbe et l’on peut marcher d’une île à l’autre à marée basse. Puis arrive le dimanche, jour du seigneur. Ma quête de musiciens est stérile jusque là. Jayapura ne possède aucun évènement culturel mis à part quelques festivals dans l’année. Il n’y a même pas de cinéma, ni de vrai magasin de musique je suis assez déçu là-dessus… Cela dit Johan m’a donné le contact d’un pasteur qui prêche dans une église où apparemment des gens s’affairent sur des « guitares bizarres » tous les dimanches, de quoi exciter ma curiosité. Je me rends évIMG_1597idemment à  cette église, accompagné de Glenn. On nous fait nous présenter sur l’estrade et les gens ponctuent nos phrases par des « Alleluyah ! » ou des « Amen ! »… Ma foie c’est pas désagréable, on se prend vite pour le messie. L’ambiance dans l’église est complètement électrique. C’est une petite bicoque sur pilotis au-dessus de la mer. Dès que la musique commence, les gens se mettent à danser et sauter et les planches de la bicoque bouge dans tous les sens. . Les musiciens jouent des ukulélé, des guitares et des contrebasses faites-maison avec des planches et des clous, c’est magnifique ! Les prêtres se succèdent en faisant des discours enflammés et le groupe joue en donnant toutes ses tripes. La foule saute de partout chante crie et danse. A la fin, des femmes entrent dans une sorte de transe et finissent en pleurant agenouillées face contre terre… Clairement le moment le plus intense de la semaine.

Puis une nouvelle semaine commence, mon visa n’est toujours pas prêt, le consulat continue ses « fermetures-surprises ». C’est là que j’apprends qu’en fait je n’ai pas besoin de mon passeport pour partir dans les montagnes… Alors je file vers Wamena, la Papouasie profonde... En avion bien sûr, puisqu'il n'y a pas de route pour aller là-haut.

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